Pour éviter le crépuscule de l’Occident, par Joël Mergui

19 mars 2012 au matin. Une nouvelle étape dans le terrorisme et le fondamentalisme est franchie. La France se réveille victime de ce que les américains avaient brutalement dû admettre le 11 septembre 2001 : le monde libre est combattu jusque sur son sol par une haine puissante et profonde de l’Occident, de ses valeurs démocratiques. 

Un homme au passé de petit délinquant, suivi par la justice et les services de renseignements, revenu de plusieurs séjours soi-disant touristiques dans les zones tribales du Pakistan et d’Afghanistan, a tué. Endoctriné par des discours de haine contre l’Occident dont le sionisme est perçu comme le pire suppôt ou l’emblème, un français de 23 ans, endoctriné, débute son djihad en achevant d’une balle dans la tête un soldat français et en prononçant ces mots :  » tu tues mes frères, je te tue.  » 

Quatre jours plus tard, au cri d' » Allah Akbar,  » il prend pour cible, dans la rue, des parachutistes en tenue. Rien n’indique l’appartenance religieuse de ces soldats en treillis dont le seul point commun est de servir dans un régiment de génie parachutiste français qui opère en Afghanistan. 

Le 19 mars, l’assassin choisit une école juive, à trois kilomètres de chez lui. Jonathan Sandler un rabbin de 30 ans et ses deux fils Arieh et Gabriel âgés de 4 et 5 ans tombent sous ses balles, un lycéen de 17 ans est grièvement blessé. Mais ce n’est pas assez. Il lui faut pourchasser à l’intérieur de l’école Myriam Monsonego 7 ans et l’exécuter d’une balle dans la tête, froidement. Le caractère antisémite du crime est indiscutable. Ces victimes sont mortes parce qu’elles étaient juives et françaises, une double raison d’incarner l’ennemi, l’Occident, ses valeurs de vie, d’égalité, de fraternité et de liberté. 

Ce terroriste tueur d’enfants est mort trois jours plus tard, abattu alors qu’il faisait feu sur les forces de l’ordre. Son nom ne mérite même pas d’être prononcé. Quelques heures à peine après sa mort, les réseaux sociaux en faisaient un héros, un martyr d’une  » juste cause « , ainsi nomme-t-on la haine chez les terroristes. 

Notre peine est immense, la douleur des familles incommensurable. 

Trois petits corps enveloppés d’un talit, un père, trois militaires réclament justice. Leurs familles, la communauté juive exigent des réponses. 

Quels moyens vont être mis en œuvre pour débusquer les terroristes en sommeil, voire en puissance, que compte encore notre pays ? Quels nouveaux dispositifs vont être déployés pour éviter que ces fanatiques passent à l’acte? Quand cesseront la diabolisation d’Israël et l’antisionisme de salon qui conduit à l’antisémitisme de rue ? Quand comprendra-t-on enfin que les mots ont un poids qui tue aussi surement que le choc des images de haine diffusées sur les médias? 

Le 18 mars, nous étions des milliers réunis lors du Congrès des communautés juives de France pour bâtir en commun notre avenir de juifs en France. L’antisémitisme nous le voulions loin, relégué dans le passé, présent mais au conditionnel. Avec confiance nous avions passé le relais à l’État qui, conscient du danger, veillait à notre sécurité. 

Bien qu’ayant été la cible verbale les jours précédents de polémiques graves, aucun des candidats qui aspirent à la plus haute fonction de l’État n’avait répondu positivement à notre invitation, calendrier électoral oblige ! 

Le lendemain pour veiller nos morts, tous sans exceptions, de toutes les grandes formations politiques, ont décrété l’union nationale et suspendu le temps électoral et nous les en remercions. Tous littéralement ont investi la synagogue de Nazareth où nous appelions à nous recueillir comme le veut notre tradition pour lire les Téhilim. 

Du monde entier, les dirigeants des plus grandes comme des plus petites nations ont unanimement réprouvé la tuerie d’enfants juifs dans une école juive française et condamné une nouvelle bête immonde tueuse de juifs. 

Mais mon cœur saigne. 

Certes, il faut en finir avec les amalgames dangereux qui voudraient opposer entre elles des communautés religieuses, ou des identités nationales. Mais il est temps surtout de séparer et mettre en évidence ce qui doit l’être. La haine qui nous a touchés en plein cœur se confond avec celle de l’Occident et de ses valeurs qui s’enracinent en partie dans le judaïsme. Au travers des juifs que l’on tue c’est la mort de l’Occident que visent les terroristes. 

Il est temps que l’Occident s’éveille et amorce son printemps des consciences. Il est temps que nos peuples se lèvent contre une nouvelle terreur brune qui a pour nom l’islamisme radical et fanatique. Il est temps de se prémunir contre cette menace qui nous vise tous à commencer par les musulmans modérés, les premiers à pâtir dans leur identité de ce qui nous vise, nous juifs, dans notre chair : l’amalgame dangereux d’une religion avec la terreur et la haine. 

Que les sept victimes du tueur de mars ne meurent pas deux fois, la première des balles d’un terroriste fanatique, la seconde de notre inconséquence. Que le printemps n’annonce pas le crépuscule de l’Occident.