Hevra kadicha : engouement accru pour les concessions perpétuelles

Les inhumations conformes à la Halakha sont réclamées davantage qu’autrefois, tout comme les enterrements en Israël qui ont doublé en peu de temps à la faveur des vagues d’alya enregistrées ces dernières années.

Serge Benhaim préside depuis cinq ans la commission consistoriale dédiée à la hevra kadicha – dont le service est dirigé par le rabbin Aimé Atlan -, autrement dit au respect des règles halakhiques en matière de décès (préparation des corps, inhumation, périodes de deuil…). Il assiste à quelques évolutions marquantes que l’institution cultuelle accompagne et, parfois, encourage. Ainsi, les foyers sont de plus en plus attachés aux concessions perpétuelles conformes à la tradition juive, malgré l’environnement ultra-laïc typique de la société française contemporaine. Ce n’était pas toujours le cas dans les années 90 ou 2000. Cela représente un effort financier de mille à deux mille euros qui s’ajoutent au prix de l’enterrement. Il faut rappeler à ce sujet que les tombes collectives, individuellement moins onéreuses (familiales ou achetées par des sociétés d’originaires de telle ou telle ville polonaise, par exemple), ne concernent plus que 17 % des deux mille cinq cents à trois mille Juifs arrachés à l’affection des leurs chaque année. La sensibilisation accrue de nos coreligionnaires aux caveaux perpétuels est donc remarquable, le coût global d’un enterrement pouvant atteindre six à sept mille euros. Les tarifs sont d’ailleurs plutôt en baisse et le seront davantage encore à l’avenir, grâce à la concurrence et… la pression amicale du Consistoire, qui a conclu au printemps dernier un accord avec sept entreprises de pompes funèbres s’engageant à respecter de bonnes pratiques et des prix raisonnables. D’autres partenaires privés pourraient se joindre au mouvement.


Troisième évolution : les effets conjugués de l’alya massive enregistrée depuis cinq à six ans et du renforcement identitaire de certaines franges du judaïsme français poussent de nombreuses personnes âgées à souhaiter reposer éternellement en Terre Sainte – et près de leurs proches qui ont choisi de s’installer en Israël. Environ trois cents membres de notre communauté étaient inhumés sur place, chaque saison, il y a une décennie. Cette statistique a plus que doublé avec quelque six cent-cinquante enterrements à Jérusalem ou ailleurs dans le pays en 2016. Sans compter la centaine de corps exhumés puis transportés là-bas au cours de la même période, dans des conditions parfaitement casher bien entendu.


On sait aussi que le Consistoire est partie prenante dans l’affaire des cinquante-huit mille tombes juives algériennes à l’abandon, délaissées et dégradées depuis l’indépendance. Serge Benhaim et des experts en hevra kadicha se sont rendus sur les lieux. Avec le soutien du Quai d’Orsay, l’institution française a obtenu du gouvernement de l’ancienne colonie la rénovation des cimetières et carrés israélites, et des regroupements lorsque cela est nécessaire et halakhiquement possible. Mais le Consistoire prévoyait surtout de « rapatrier » les ossements dans l’Hexagone ou en Israël si les familles en faisaient la demande. Seule une cinquantaine se sont manifestées ces derniers mois. C’est pourquoi Serge Benhaim privilégie à présent la restauration des emplacements concernés. « Les autorités algériennes manifestent une réelle bonne volonté, dit-il, en dépit des lenteurs administratives. Les esprits chagrins qui affichent leur méfiance à cet égard se trompent. Je rappelle qu’aucune profanation, aucun acte antisémite n’est à l’origine des délabrements que nous avons observés. Ils sont liés aux guerres, à l’usure du temps, à la négligence… et non à la volonté de nuire. Jack-Yves Bohbot, chargé du dossier au Consistoire, et moi-même en sommes convaincus ».