Gala du Patrimoine Juif de France pour les 210 ans du Consistoire

1808 – 2018 : Le Consistoire bâtisseur du patrimoine juif de France

Parmi les 400 personnes venues célébrer à l’Hôtel de ville de Paris le 4 juin dernier, le patrimoine juif de France et les projets d’avenir du Consistoire, soirée placée sous l’égide du Premier ministre Édouard Philippe et la Maire de Paris Anne Hidalgo, figuraient aux côtés du Président du Consistoire Joël Mergui et des Grands Rabbins de France et de Paris Haïm Korsia et Michel Gugenheim, nombre de responsables communautaires, de donateurs et de fondateurs concernés par des projets de construction parisiens ainsi que la Présidente du Conseil Régional d’Île-de-France Valérie Pécresse, l’Académicien Alain Finkielkraut, le président de la FMS David de Rothschild, le président du Crif Francis Kalifat , le président du FSJU et de la Fondation du Judaïsme français Ariel Goldmann ainsi que de nombreux artistes parmi lesquels notamment Marek Halter, Michel Jonasz, Steve Suissa, Daniel Levy et Amir ; Gérard Darmon et Stéphane Bern ayant par ailleurs prêté leur voix pour raconter dans un court documentaire, 210 ans d’histoire du patrimoine juif français sur fond d’histoire juive en France.

 

Dans son discours d’accueil Joël Mergui a rendu hommage aux sages du Grand Sanhédrin qui, d’une seule voix, à la question de savoir si les juifs avaient l’obligation de défendre la patrie avaient répondu : « oui jusqu’à la mort ! » inaugurant ainsi le modèle d’intégration exemplaire des juifs à la nation sous la devise consistoriale «  Patrie et Religion. »

Revenant sur les célébrations du Bicentenaire qu’ils avaient organisées, Joël Mergui s’est souvenu avoir salué le dynamisme de la seule communauté juive d’Europe à s’être développée et épanouie après la shoah grâce à l’arrivée des juifs d’Europe de l’Est et d’Afrique du Nord. Dix ans plus tard, une nouvelle idéologie meurtrière et antisémite a stoppé cette époque de croissance de la communauté juive française pour la transformer en brutale «  décroissance. » En dix ans, marquée par les drames et les exécutions barbares de juifs, la communauté a été placée devant un choix difficile : partir ou rester ? Elle a choisi avec le Consistoire non pas de rester, mais de résister, de ne jamais renoncer et de construire, fidèle à l’engagement pris il y a 210 ans, de servir également « Patrie et religion, » à l’heure où d’autres font le choix de servir une idéologique antisémite et meurtrière pour détruire la patrie jusqu’à la mort.

 

Pour Valérie Pécresse, c’est cette devise du Consistoire qui « guide le partenariat étroit qui unit la communauté juive et la France. » Faisant sienne la déclaration de l’ancien Premier ministre Manuel Valls, la présidente de la région Île-de-France a renouvelé son engagement à soutenir tous les projets structurants de la communauté juive qui construit l’avenir avec espoir malgré les risques car «  l’ Île-de-France sans les juifs ne serait plus l’ Île de-France. »  A ce titre, quelques jours après une double inauguration avec la maire de Paris, Valérie Pécresse a rendu hommage à Simone Veil, grande figure de la politique française et du Judaïsme français dont le nom est désormais associé à la station de métro Europe et à la nouvelle adresse du siège de la région en Seine-Saint-Denis.

Cet engagement en faveur de la mémoire et de la lutte contre l’antisémitisme s’est matérialisé pour Valérie Pécresse dans l’adhésion de la région en faveur du «  projet un peu fou mais extraordinaire » du Centre Européen du Judaïsme qui, face à un avenir assombri par les drames signifiait selon  la présidente de région que : « c’est à Paris que vous vouliez bâtir et que cet amour de la France vous alliez le clamer envers et contre tout ». Un projet qui selon Valérie Pécresse contribuera à donnera aux enfants franciliens des racines et des ailes.

 

Anne Hidalgo a pour sa part souligné le fait que : « l’on ne peut pas comprendre Paris sans comprendre l’histoire de cette présence, de la communauté juive et du Judaïsme (…) La présence des juifs à Paris fait partie de son histoire dans les meilleurs moments comme dans les pires. »  Pour la maire de Paris, la communauté a été traversée par des doutes, elle fut mise à l’épreuve par des drames inacceptables causés par un antisémitisme qui ronge la République et qui prend la forme d’un antisionisme inacceptable qu’il faut combattre. Sans nul doute pour Anne Hidalgo, si les synagogues marquent l’histoire de la communauté juive dans la cité, elles font aussi partie de notre patrimoine commun dans lequel les nouveaux projets de la communauté juive ont toute leur place.  Le CEJ mais aussi l’Espace du Judaïsme de l’ACIP 16 et tous les autres projets signifient : «  que la communauté est ancrée dans cette ville de Paris qui est la ville de sa protection et de son avenir, » a déclaré la maire de Paris avant de conclure « Vous pourrez toujours compter sur moi, sur cette ville pour vous accompagner dans (vos) projets. »

 

Édouard Philippe : En introduisant son discours en référence à la « Maison sublime », plus vieux patrimoine juif de France, découvert à l’occasion de travaux à Rouen, le Premier ministre a tenu à rappeler que ce patrimoine appartient au patrimoine national commun de tous les Français. « Ces pierres ont une âme qui nous parlent de notre histoire commune » et qui pour le Premier ministre en disent long sur l’attachement des juifs à leur patrie et sur leur double volonté d’intégration et d’émancipation à travers l’histoire. Des pierres qui parlent aussi d’avenir pour les projets immobiliers qui sortent de terre malgré les difficultés de toutes sortes car « le consistoire a fait le choix de ne pas fermer de lieux de culte, il fait mieux que cela, il les entretient, il les rénove et les sécurise. Ce faisant le Consistoire préserve le plus grand patrimoine juif d’Europe qui fait la fierté de notre pays et contribue à notre rayonnement. » L’État a par ailleurs déclaré le Premier ministre continuera de faciliter le CEJ, mais aussi dans les projets du 16earrondissement et de Courbevoie notamment tout en soulignant que la confiance de la communauté juive et du Consistoire exprime « une forme de courage, celui du refus de la peur de l’avenir, le refus qui se nourrit de fermeté mais pas de naïveté ». Les menaces existent, violentes et aveugles mais a t-il souligné « nous ne pouvons pas nous résoudre à ce que la construction d’une synagogue devienne presque un acte de résistance (…) Le terme pudique qui, a vrai dire me glace, c’est celui d’Alya intérieure pour désigner ces juifs qui changent de quartier parce qu’ils ne se sentent plus en sécurité là où ils vivaient depuis des années. » Édouard Philippe a notamment confirmé son intention prochaine de renforcer la règlementation européenne sur le retrait des contenus sur les plateformes numériques avec pour l’objectif « de ne rien laisser passer, de faire reculer  l’impunité et l’anonymat, » annonçant la réactivation du Prix Ilan Halimi pour encourager les initiatives des citoyens qui portent avec fierté les valeurs de la République. C’est avec l’évocation de la Maison sublime de l’humanité qu’il appartient à tous de construire et sur les alexandrins de Charles Peguy sur l’inutilité des calculs humains, que le Premier ministre a conclu son allocution.

 

Alain Finkielkraut, terminant les prises de paroles, s’est excusé de jouer les Cassandre en n’évoquant ni les projets ni le patrimoine pour centrer son discours sur la haine des juifs qu’il avait crue, avec d’autres, appartenir à un passé révolu. « Je me suis trompé, l’impensable s’est produit » Des enfants sont assassinés, des personnes molestées « des familles juives déménagent de certaines communes où elles ne sont plus les bienvenues, » des école et des synagogues sont protégées comme des forteresses par des soldats en armes. Ce démon-là de l’antisémitisme n’est pas, aux yeux de l’académicien, « un vieux démon, il nous vient du dehors (…) en même temps que la haine de la France. Judéophobie et francophobie sont aujourd’hui les deux faces d’une même médaille. » C’est à ce prix que se crée, selon Alain Finkielkraut, « une solidarité de destin qui est le nouveau franco-judaïsme. » Dénonçant les sagesses en déroute prises à contre-pied par ce nouveau « code culturel » qu’est devenu l’antisémitisme dans les territoires perdus de la République, pour citer son ami Georges Bensoussan, l’Académicien a également soutenu les intellectuels engagés du monde musulman qui signalent et protestent contre l’antisémitisme installé dans l’espace privé. « La dénonciation officielle de l’antisémitisme d’hier et la volonté d’en tirer toutes les leçons, pavent la voie à l’antisémitisme de demain paradoxalement » at-il conclu en rappelant que la ville de Troie n’aurait pas été détruite si les avertissements de la fille de Priam et d’Hécube avaient été entendus …