Comment résoudre un conflit… sans jugement ?

Le colloque sur la médiation proposé le 10 septembre par Maître Elisabeth Steiner, élue du Consistoire chargée de la famille, a mis en lumière une manière de s’entendre très contemporaine mais déjà hautement recommandée par la Torah.

Il y avait davantage de femmes que d’hommes – et surtout des professionnels du droit et de la psychologie ou responsables associatifs – au colloque organisé le 10 septembre, en fin d’après-midi, dans le cadre de la synagogue parisienne de la rue Notre-Dame-de-Nazareth (3ème) sur le thème : « La médiation familiale entre au Consistoire ». Les débats ont porté sur cette alternative… apaisée aux procédures judiciaires en général et pas seulement sur le nouveau service de médiation proposé depuis juin par l’antenne réservée aux divorces au sein de l’institution cultuelle.


C’est Maître Elisabeth Steiner, son administratrice chargée de la famille et médiatrice elle-même, qui a animé les discussions ouvertes par le président de la synagogue et vice-président du Consistoire, Jack-Yves Bohbot. Il a remarqué d’emblée que l’endroit était parfaitement choisi pour parler des couples puisque six mariages y avaient été célébrés dans la journée. Un sur deux, hélas, se termine par une séparation. Dans ce domaine, les statistiques sont équivalentes dans notre communauté et dans l’ensemble de la société.

Le grand rabbin de la capitale, Michel Gugenheim, a rappelé que la Torah, recueil de textes « post-modernes » en avance sur l’actualité, quelles que soient les époques, considérait déjà le processus de médiation comme indispensable et même supérieur à la justice – au sens classique du terme. En effet, les Pirké Avot (Traité des Pères) rapportent que des figures du judaïsme n’hésitaient pas à broder pour laisser croire que chaque partie voulait faire un pas l’une vers l’autre lors d’un litige. L’objectif était bien sûr de les amener à négocier. Pour obtenir le shalom, il est préférable pour le magistrat de trouver un compromis en donnant raison à tous les plaignants – même si c’est une hypocrisie – plutôt que d’entretenir la perpétuation d’un conflit, a expliqué en substance Michel Gugenheim.

C’est Danièle Ganancia, ancienne vice-présidente du Tribunal de grande instance de Paris, qui a décortiqué pour l’assistance les différences entre jugement et médiation. Maître Steiner est revenue sur la procédure de divorce par consentement mutuel en vigueur depuis début 2017, qui permet de s’entendre sans passer par le prétoire, avec avocat(s) et notaire uniquement et en moins de trente-sept jours.

Parmi d’autres interventions, on retiendra celle d’Henri Cohen-Solal, psychanalyste et spécialiste franco-israélien du travail social (il a fondé dans l’Etat juif de célèbres maisons pour jeunes en déshérence). Il a noté que dans notre communauté, la difficulté invoquée souvent par les mariés en instance de séparation était la pratique ou l’absence de pratique religieuse de l’un ou de l’autre. En principe, quand l’un fait techouva et quand le conjoint ne suit pas, la question du divorce se pose… Aux yeux d’Henri Cohen-Solal, ce motif masque généralement des problématiques plus profondes liées au passé, inconscient ou non, et à l’entourage des personnes concernées.