Cérémonie du Souvenir à la mémoire des Déportés et des Victimes de la Shoah

« Voix de femmes »

Fidèle à notre tradition consistoriale depuis 1946, la Grande synagogue de Paris a accueilli, le 5 septembre 2021, la cérémonie religieuse du Souvenir.

Instituée par le Rabbinat français depuis septembre 1946, elle permet aux familles endeuillées de réciter le Kaddish pour leurs disparus. Elle a lieu le dimanche qui précède Roch Hachana, premier jour des Selichot ashkénazes (supplications). Compte tenu du calendrier très anticipé des fêtes de Tichri de cette année, la cérémonie avait lieu la veille du premier soir de Roch Hachana.

« Voix de femmes », était le thème de cette cérémonie en hommage aux femmes dans la déportation.

Avec France Télévision nous avons décidé de traiter désormais chaque année d’un thème fort. En 2020, la mémoire des enfants martyrisés fut illustrée par la lecture de plusieurs lettres bouleversantes adressées à leurs proches.

Cette année ce sont des témoignages de femmes déportées qui ont été lus par des descendants ou par des témoins présentés lors de l’allumage des six bougies qui symbolisent les six millions de victimes juives de la barbarie nazie.

Cette cérémonie a été introduite, puis conduite par Francis Huster qui a d’abord rappelé, qu’elle est, avant tout, dédiée aux six millions d’âmes disparues pendant la Shoah, soit 40% des juifs du monde entier.

Parmi toutes ces victimes, les femmes ont occupé une place centrale, elles se sont battues, elles ont tenté de protéger les leurs, en particulier leurs enfants en les accompagnant dans les chambres à gaz. Elles ont été héroïques. Ce sont certains de leurs témoignages qui ont été choisis pour cette cérémonie, qu’elles soient survivantes ou disparues, qu’elles soient célèbres ou anonymes.

Après la sortie du rouleau de la Torah que Félix Loeb, Président d’honneur de la Victoire a remis symboliquement à Serge Klarsfeld, c’est l’allumage des six bougies, symbolisant la mémoire des six millions de juifs assassinés qui constitue le point focal de la cérémonie. Elles sont traditionnellement allumées par un ancien déporté accompagné par un de ses arrière-petits-enfants.

Cette année Léa Roathyn, Julia Wallach, Ginette Kolinka, Yvette Lévy, toutes quatre rescapées d’Auschwitz ont allumé les quatre premières bougies, ensuite ce furent Sarah Wojakowski, ex-enfant cachée accompagnée par la famille Fricker, descendants des Justes qui la sauvèrent, puis Henri Zajdenwerger, seul survivant du convoi 73, qui ont    allumé les deux dernières.

Des lettres ou textes lus par des personnalités particulièrement concernées ont introduit chaque allumage.

Pierre-François Veil a lu avec une grande émotion un texte de sa mère Simone Veil, dont la mémoire est très régulièrement bafouée par des antisémites primaires. Un extrait plein d’espérance du livre « C’était génial de vivre » reprenant leur entretien avec Marceline Loridan-Ivens avait été choisi par Isabelle Weckstein et David Teboul. Puis, Catherine Ringer nous a merveilleusement transmis l’émotion de la dernière lettre d’Hélène Berr, 24 ans, écrite en février 1944 depuis le camp de Drancy, juste avant sa déportation à Auschwitz.

Esther Senot, 93 ans, déportée à 15 ans et rescapée d’Auschwitz qui, avec simplicité et dignité, a décrit son voyage vers l’horreur en nous transmettant la promesse faite à sa sœur ainée : « raconter ce qui nous est arrivé, ce que des êtres humains ont pu faire à d’autres êtres humains… »

Raphaëlle Abramczyck a clôturé ces témoignages par la lecture poignante d’une jeune déportée de 19 ans, anonyme, Jacqueline.

Les chœurs, le violon et l’orgue ont ajouté à l’émotion de ces témoignages en reprenant les thèmes de Echet’Hayil et de ma Yiddishe Momme, thèmes traditionnels dédiés à l’épouse et à la mère juive.

Nos partenaires de France Télévisions, Laurence Godon et Antoine Slodre en tête, ainsi que notre ami Steve Suissa qui produit les émissions religieuses sous la direction d’Isabelle Sarda, nous ont soutenus merveilleusement pour aboutir dans les délais pour la préparation de cette retransmission, malgré les incertitudes liées à la pandémie depuis le mois de juin dernier.

Claude Bochurberg et Serge Klarsfeld ont réussi à convaincre les survivants et leurs familles d’assurer la pérennité de la cérémonie par leur présence, en cette période à risque pour tous. En cette année de la Femme il y avait nécessité de transmettre en direct le souvenir de toutes ces femmes assassinées afin que leur souvenir ne s’efface pas.

Plus de 600 personnes ont entouré les nombreuses personnalités officielles qui souhaitaient s’associer à ce devoir de Souvenir, au premier rang desquelles : le Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, Elisabeth Moreno Ministre chargée de l’Egalité entre les hommes et les femmes et Emmanuelle Wargon Ministre de la Transition écologique et du Logement.  Les ambassadeurs d’Allemagne, de Pologne, de Turquie, de Hongrie, du Danemark, de la République Tchèque, les consuls des Etats Unis et du Maroc et bien évidemment la représentante d’Israël étaient présents.

Le Vice-Président du Sénat Roger Karoutchi, le Préfet de Région Ile de France Marc Guillaume et la représentante du Préfet de Police ainsi que le Préfet délégué à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, Frédéric Potier, assistaient à cette cérémonie.

Toujours fidèles à cette importante commémoration le représentant de la Maire de Paris, Anne Hidalgo, celui de la Présidente de Région Valérie Pécresse et une grande partie des Conseillers de Paris avec Karen Taïeb chargée de l’Histoire et de la Culture en tête, la plupart des parlementaires, des maires d’arrondissements de Paris ou de la Région parisienne, assistaient à la cérémonie ;  en particulier la Maire du IXème Delphine Bürkli ,  du VIIIème Jeanne d’Hauteserre et du XVIème Francis Szpiner ainsi que les dirigeants de grandes institutions juives, F.M.S., le FSJU, le Keren Hayessod, l’OSE,  ainsi que le Président du CRIF Francis Kalifat.

Monseigneur Thibault Verny, Archevêque auxiliaire qui représentait l’Archevêque de Paris, côtoyait le Nonce Apostolique et les représentants du culte musulman.

Dans leurs prises de paroles le Président des Consistoires Joël Mergui a tenu à rappeler que la lutte contre l’Islam radical menée par les Pouvoirs publics est, d’autant plus, une cause nationale que les populismes de gauche comme de droite l’instrumentalisent pour attiser le ferment de l’antisémitisme. En cette cérémonie en hommage aux femmes, il a également rappelé la mémoire de Mireille Knoll, échappée de la Rafle du Vel d’Hiv en 1942, assassinée chez elle à Paris en 2018 parce que juive

Le Grand rabbin de Paris, Michel Gugenheim, en saluant la présence des hautes autorités de l’Etat, a rappelé que la Shoah a été la plus grande catstrophe que le monde ait connu, car elle a démonté que l’intelligence humaine ne constitue aucune garantie de protection et qu’au contraire elle peut se mettre au service de la pire barbarie.

Le Grand rabbin de France Haïm Korsia a tenu à mettre en exergue l’œuvre de Beate et Serge Klarsfeld pour démontrer  ce que des hommes ont été capables d’infliger à d’autres hommes et surtout que rien ne saurait être comparé à la Shoah qui ne peut être ni banalisée et encore moins instrumentalisée.

Les moments les plus émouvants ont été donnés par l’interprétation du Ministre-officiant des chants liturgiques traditionnels, en particulier un bouleversant El Mole Rahamim et le Chema Israël accompagnés par le chœur de la Grande synagogue et la chorale des enfants de la Grande synagogue  dirigés par la cheffe de la Musique consistoriale Emmanuelle Souffan.

Steve Suissa a tenu à clôturer la cérémonie après le son du Choffar de Roch Hachana et de Yom Kippour en interprétant avec foi et talent le célèbre « Avinou Malkéinou » de Janowski, accompagné au piano et au violon.

Intensité de notre émotion à la veille des grandes fêtes de Tichri !

Jacques Canet

Pour revoir l’intégralité de cette cérémonie en vidéo, cliquez ici : https://vimeo.com/601687402