Cérémonie à la Mémoire des Martyrs de la Déportation

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Comme le veut la Tradition, la Grande synagogue de Paris a accueilli, le 13 septembre 2020, la cérémonie religieuse du Souvenir. Instituée par le Rabbinat français depuis septembre 1946, elle permet aux familles endeuillées de réciter le Kaddish pour leurs disparus. Elle a lieu le dimanche qui précède Roch Hachana, premier jour des Selihot (supplications), du calendrier ashkénaze.

 

« Les enfants pendant la Shoah », était le thème de la cérémonie, présentée et scandée, cette année, avec une très grande émotion par Francis Huster. En donnant lecture de lettres bouleversantes adressées à leurs proches, vie a été redonnée à des jeunes martyrs, arrêtés et en attente de déportation vers leur destin.

 

Francis Huster a rappelé que parmi les 76.000 juifs déportés depuis la France vers les camps de la mort, 33.000 l’ont été en onze semaines du 17 juillet au 30 septembre 1942, au rythme de trois convois par semaine. Suite aux réactions de la population et des églises pendant l’été 1942, la collaboration policière active de l’Etat Français a été freinée : 17.000 juifs ont été déportés en 1943 et 16.000 en sept mois de l’année 1944 jusqu’à la Libération. Les organisations juives et les familles ont pu sauver plus d’enfants en France que partout ailleurs en Europe, grâce la solidarité d’une population éduquée dans les valeurs républicaines et la charité chrétienne.

 

Ce sont 11.400 enfants qui ont, néanmoins, été déportés parmi lesquels seuls 200 adolescents ont survécu. Mathilda May, Stéphane Bern, Serge Klarsfeld et Steve Suissa ont fait revivre ces enfants en lisant les lettres de Denise Holstein, Naftal Prochovnik, Georgy Halpern et Jacques Lubetski. Raphaëlle Abramczyck et son grand-père ont fait le récit de l’évasion de Sarah Lichtstein, 14 ans. Un des derniers témoins, Henri Zajdenwerger, a 17 ans lorsqu’il est arrêté à Angoulême puis déporté de Drancy en mai 1944. Seul survivant du convoi 73, il nous a bouleversé par le récit de sa survie et de son combat pour la mémoire, jusqu’à ce procès de Hambourg en janvier 2020 où lui, le dernier survivant, a fait condamner le dernier gardien SS du camp nazi du Stutthof où il avait été détenu.

 

Chacune des six bougies qui rappellent la mémoire des six millions de juifs assassinés pendant la Shoah a été allumée par un ancien déporté et un de ses petits-enfants, après l’évocation de chacune de ces six tranches de vies d’enfants effacées. L’émotion de ce symbole a été renforcée par le refrain de Eli Ata, (tu es mon D…) susurré par l’orgue, le violon ou le chœur de la Victoire dirigé par Emmanuelle Souffan.

 

Cette année, compte-tenu de la pandémie, nous étions très inquiets sur la faisabilité et le déroulement de cette importante cérémonie. Y renoncer eût été un sacrilège car elle fait partie de l’ADN du Consistoire et de la Victoire. Heureusement, nos partenaires de France Télévisions, Laurence Bobillier et Antoine Slodre en tête, ainsi que notre ami Steve Suissa qui produit les émissions religieuses sous la direction d’Isabelle Sarda, nous ont soutenus pour aboutir dans les délais. Claude Bochurberg et Serge Klarsfeld ont réussi à convaincre les survivants et leurs familles d’assurer la pérennité de la cérémonie par leur présence, en cette période à risque pour eux tous. La nécessité de transmettre en direct le souvenir des enfants assassinés a été le moteur de toutes ces énergies.

 

La Victoire a mis en place un protocole sanitaire très rigoureux et l‘office religieux a pu se dérouler en présence de plus de 600 personnes, masquées n’occupant qu’un siège sur deux.

 

Un nombre de personnalités beaucoup plus important que les années précédentes a bravé la crise pour répondre présent à ce devoir de Souvenir, au premier rang desquels : le Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin et le Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. Les ambassadeurs des Etats-Unis, d’Allemagne, d’Autriche, de Lituanie, du Danemark, de Hongrie, du Portugal, de Pologne et évidemment d’Israël étaient également présents. Autour de la Maire de Paris, Anne Hidalgo et d’une grande partie des Conseillers de Paris, on remarquait également de très nombreux  parlementaires, des maires d’arrondissements de Paris ou de la Région parisienne, en particulier la Maire du 9e Delphine Bürkli , du 5e Florence Berthout, du 7e Rachida Dati, du 8e Jeanne d’Hautesserre et du 16e Francis Szpiner ainsi que les dirigeants de grandes institutions juives, F.M.S., le FSJU, le Keren Hayessod, ainsi que le Président du CRIF Francis Kalifat. La représentante du Préfet de Police et le Préfet de la Région Ile-de-France, Marc Guillaume ainsi que le Préfet délégué à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, Frédéric Potier assistaient aussi à cette cérémonie. Monseigneur Thibault Verny, Archevêque auxiliaire qui représentait l’Archevêque de Paris, côtoyait le Nonce Apostolique et les représentants du culte musulman.

 

Le Président du Consistoire Joël Mergui, en honorant la mémoire de Milo Adoner et de Paul Schaffer récemment disparus, a rappelé que la haine des juifs est le baromètre de la haine de la Démocratie.

 

Le Grand rabbin de Paris Michel Gugenheim, en saluant la présence des hautes autorités de l’Etat, a souligné qu’à la veille de Roch Hachana, le souvenir des victimes de la Shoah doit éveiller les consciences pour un monde de Paix et d’Amour.

 

Le Grand rabbin de France Haïm Korsia a voulu personnaliser cette cérémonie autour de la grande figure que fut notre fidèle ami Paul Schaffer, inlassable témoin, qui s’était donné pour mission sacrée d’écrire un livre pour rester en vie et transmettre aux jeunes générations.

 

Les moments les plus émouvants ont été donnés par l’interprétation du Ministre-officiant des chants liturgiques traditionnels accompagnés par le chœur de la Grande synagogue ainsi que d’un chant Yiddish « Yahrzeit Licht » et surtout par la remarquable interprétation au violon de la Liste de Schindler par Anne Gravoin, accompagné à la harpe par Julien Marcou.

 

 

Photos © Alain Azria